judith et holopherne photo
Photo by dalbera

Voilà une grave question qui appelle réflexion: Faut-il jeter ses dessins ? Si tu veux connaître le fond de ma pensée il va falloir lire jusqu’au bout cet article; Hey pas de triche tu ne fais pas défiler le texte jusqu’en bas… Tu prends le temps de lire comme tu prends le temps de vivre – du moins je l’espère pour toi !

D’abord je t’explique la raison de cette question. J’ai déjà abordé le sujet sur ce blog. Mon amie Maryse De May déménage et quitte la Région Parisienne où elle a toujours vécue. Un déménagement c’est un grand “chambardement” et à cette occasion on se rend compte que, tout au long de notre vie, nous accumulons des quantités invraisemblables de souvenirs qui encombrent nos placards et notre mémoire.

Je ne jette rien ou très peu – rend-toi compte – j’ai encore mon hochet de bébé avec la trace de mes premières dents de lait… Bon encore faut-il que je sache ce que j’en ai fais et ça c’est une autre paire de manches ! Sur Instagram j’ai même publié la photo de quelques billets d’encouragements et billets d’honneur reçus à l’école primaire… C’est tout dire sur mon côté conservateur. A l’inverse Maryse n’hésite pas à se débarrasser de ce qui l’encombre et notamment certaines de ses aquarelles qu’elle n’aime plus 🙁

Pourquoi gardons nous ?

  • Pour des raisons sentimentales d’abord. Un objet, un dessin, une aquarelle sont des bouts de notre histoire, des morceaux de vie de l’artiste. En voyant certains de mes dessins je l’associe à des souvenirs qui remontent alors à la surface de ma mémoire. Notre mémoire fonctionne par “couches successives”, les derniers souvenirs (les plus récents) viennent prendre la place de souvenirs plus lointains qui peu à peu s’estompent mais ne s’effacent pas. Dessiner c’est fixer sur le papier un peu du temps qui passe si rapidement.
  • La mémoire utilise des outils sensoriels pour se fixer, s’incruster dans les couches profondes de notre cerveau. Ainsi un souvenir peut se trouver associé à une odeur, un parfum, un son, une forme, ou une couleur. Inversement la vision d’une image peut déclencher le processus de réactualisation d’un souvenir lointain. Par exemple le souvenir des “bons points” scolaires m’a fait me rappeler le nom des institutrices de mes écoles primaires de Villeneuve-le-Roi et Villemoisson-sur-Orge – Mesdames Fourchet et Barachet. Noms auxquels d’ordinaire ma mémoire n’a pas accès. Il s’agit alors de ce que j’appelle un “ancrage mémoriel”. L’objet conservé ou le dessin jouent le rôle d’aide mémoire (de pense bête).
  • Par mesure d’économie. Garder c’est ne pas jeter – ce qui est une Lapalissade – mais c’est pouvoir réutiliser tout ou partie de l’objet conservé. En cela la démarche s’avère parfois écologique. J’ai rédigé un article sur le “dessin écolo” improprement ainsi dénommé pour expliquer le réemploi de feuilles de carnets de croquis non utilisées. Il est toujours possible de dessiner ou peindre au dos d’une aquarelle si nous ne sommes pas satisfait de celle ci.
  • Un dessin, une peinture peuvent avoir été reçus en cadeau ou achetés à un ami artiste que nous aimons. L’oeuvre peut cesser de nous plaire sans pour autant que nous cessions d’apprécier son créateur et ami. L’attachement sentimentale est totalement déconnecté de la valeur pécuniaire d’une oeuvre. Nous pouvons aimer un dessin sans valeur marchande et ne pas apprécier un dessin qui coûte cher. Les deux ne sont pas forcément liés.
  • Par habitude ou atavisme familiale : Les parents commencent à collectionner et les enfants font de même sans toujours faire preuve du même discernement: “C’est comme ça dans ma famille” entend-on alors tandis que les placards se remplissent et débordent de tout un “fatras” de trucs sans valeur.
  • Tant que l’on n’a pas vendu on n’a rien perdu“. Les temps changent, ce qui coûtait très cher hier est passé de mode aujourd’hui et plus personne n’en veut… Un autre exemple ? Une encyclopédie Larousse en 20 volumes achetée à crédit très cher par mes parents. Abîmée par un dégât des eaux je l’ai racheté sur “le bon coin” pour 90 euros soit moins du dixième du prix initialement payée lors de son lancement. De nos jours, l’encyclopédie ne s’appelle plus “Larousse” mais “Wikipédia” et prend moins de place et de poussière! Les œuvres achetées aux artistes peuvent, soit voir leur prix explosé à la disparition de l’artiste, soit ne valoir plus grand chose quelques années plus tard (même de leur vivant). Triste destinée des hommes comme de leurs œuvres.
  • Pour sa valeur pédagogique: En gardant nos travaux, nous pouvons faire des comparaisons et mesurer le chemin parcouru. Nous apprenons plus de nos mauvais dessins que de nos bons dessins. Un bon dessin est “la somme de toutes nos erreurs”, car nous apprenons plus de nos échecs que de nos succès. On ne sait pas toujours pourquoi un dessin est bon mais lorsque nous n’aimons pas un dessin, généralement, nous en connaissons la raison.

Pourquoi jetons nous ?

  • Pour faire de la place. Je t’ai dis au début de cet article que Maryse déménage et qu’a cette occasion elle avait détruit certaines aquarelles anciennes qui ne lui plaisaient plus. Nombreux sont les artistes qui ont détruit certaines de leurs œuvres qu’ils ne voulaient pas voir passer à la postérité. C’est évidemment le droit de tout créateur (voire le devoir…) de porter une regard critique sur son travail.
  • Pour changer de décor. Un dessin ou un tableau si ils sont accrochés sur un mur deviennent des éléments de décoration et de ce fait sont un jour susceptibles d’être remplacés.
  • Pour oublier. Lors d’un divorce, d’une rupture brutale, souvent les objets familiers sont victimes du ressentiment éprouvé envers l’autre – “coupable de notre malheur”. Ce dessin, cette aquarelle, évoque trop de “mauvais” souvenirs et fait les frais de toute la charge émotionnelle négative qu’il cristallise sur lui. Il incarne “le mauvais compagnon” et doit disparaître pour que disparaissent les mauvais souvenirs… L’œuvre incriminée n’y est pour rien mais c’est vécu comme tel.
  • Parce que l’objet jeté ou le dessin était abimé. Une aquarelle, un pastel, un dessin sont réalisés sur un support fragile qui est le papier. Celui-ci peut brûler, subir un dégât des eaux, être couvert de moisissures, se déchirer, être ronger par des souris, des vers à bois, voire des mites. Bref si les dégâts sont irréparables, l’œuvre sera détruite.
  • Pour valoriser son travail. Ce paradoxe – car s’en est un – veut qu’un artiste produise toujours des œuvres de qualité. il donne toujours à voir le meilleur de son travail. Je ne connais aucun artiste qui expose ses brouillons, ses œuvres ratées pour montrer ce qu’il a fait de moins bon… C’est tout le contraire: Ne sont encadrés et montrés que les meilleurs dessins, les meilleures aquarelles. Tout ce que l’artiste juge moins bon ou raté est alors bien souvent détruit afin de ne garder que ce qui est jugé par l’artiste comme sa meilleure production.

Un peu d’ésotérisme

Si tu me lis régulièrement tu connais mon goût pour l’ésotérisme et le symbolisme qui offre une autre perspective, un autre regard sur le monde qui nous entoure. Si cet aspect ne t’intéresse pas (ce que je comprends très bien), saute ce paragraphe et le suivant pour aller directement à la conclusion de cet article. Pour les autres, suivez-moi…

Voyons du coté de la numérologie et comparons les valeurs des mots JETER et GARDER.

JETER = 1 + 5 + 2 + 5 + 9… Le mot est très intéressant. Notons d’abord la position centrale d’équilibre occupée par le DEUX. Si on regarde du point de vue de la “symétrie” du mot, les 5 sont en équilibre et leur somme donne 10 ou 1, tandis que les “extrêmes” en déséquilibre apparent (1 n’est pas égale à 9) se complètent pour retrouver l’équilibre du 10 = 1. Les deux plateaux de la balance – dont l’axe centrale est le T = 2 – s’équilibrent dans l’UNION de leurs forces. Le DEUX symbolise l’UNION ou son contraire LA SÉPARATION. Jeter c’est bien se séparer de quelque chose ou de quelqu’un (“se faire jeter”). Il est aussi intéressant de constater que le dessin de la lettre T symbolise un plateau horizontale en équilibre sur un axe verticale un peu comme les plateaux d’une balance avec le fléau pour indiqué le point d’équilibre.

La somme théosophique du mot JETER vaut 22 (nombre obtenu en faisant le total de la valeur numérologique de chaque lettre). La vingt-deuxième lame du TAROT DE MARSEILLE est le FOU encore appelé le MAT. Cet arcane fait également penser au jeu d’échec dont la victoire (ou l’échec) s’obtient par un “échec et mat”. Cette lame du TAROT représente un personnage avec son baluchon sur l’épaule. Il déménage pourrait-on dire pour changer d’horizon. C’est effectivement lors d’un déménagement qu’il est temps de vider ses placards et jeter ce dont on n’a plus besoin…

JETER c’est aussi phonétiquement JE TAIS (du verbe TAIRE) soit JE CACHE, JE DISSIMULE. L’artiste en jetant les œuvres qui ne lui plaisent plus les dissimule au regard des autres. La meilleure façon de garder un secret est de le taire (TERRE = ENFOUIR)…

Examinons à présent le mot GARDER = 7 + 1 + 9 + 4 + 5 + 9 = 35 = 8

La lame 8 du TAROT DE MARSEILLE représente la JUSTICE avec un GLAIVE dans la main droite et une BALANCE en équilibre dans la main gauche. La main droite est dite active, c’est celle qui frappe ou donne tandis que la main gauche passive est celle qui reçoit.

En numérologie le 8 incarne la PUISSANCE, le POUVOIR, l’ABONDANCE. Et en mathématique le signe de l’INFINI est représenté par un huit couché. Garder une infinité de choses porte aussi en lui un avertissement et sa sanction = Gare (au) Dés(ordre). Tout garder entraîne une accumulation d’objets qui très vite tourne au désordre (ça je connais très bien). J’ai la malencontreuse habitude de tout garder et le résultat est souvent un grand fouillis autour de moi…

Conclusion

Il y aurait, sans aucun doute, encore bien des symboles à explorer autour de ces deux mots mais cela pourrait finir par rebuter quelques uns et tel n’est pas le but recherché dans ce blog qui est au contraire celui de divertir, d’instruire, ou de faire réfléchir. Alors faut-il garder ou jeter ses dessins ou ses aquarelles ? Je vais te raconter une histoire vraie récente qui s’apparente à un conte de fée.

Il était une fois dans le Sud de la France une grande demeure que son propriétaire restaurait. Un jour dans le grenier il découvrit une toile ancienne très abimée par les eaux de pluie – la toiture laissant passer l’eau par endroits. Ce propriétaire hésitait entre jeter la toile abimée ou la faire nettoyer. Pour faire son choix il lui fallait l’avis d’un expert qui sous la croûte de poussière et de salissures reconnut l’œuvre d’un Maître… Il fut donc décidé de la nettoyer et de la restaurer. Après de nouvelles expertises, l’œuvre fut attribuée au Caravage. On avait perdu la trace de “Judith et Holopherne” au 17ème siècle et c’est en 2014 qu’elle fut découverte dans ce grenier. Son estimation est de plus de 100 millions d’euros et fut achetée – de gré à gré – par un milliardaire Américain. Alors faut-il garder ou jeter les vieux dessins ? Certes tout le monde ne s’appelle pas Caravage ou Rembrandt, mais ma chère Maryse De May ne devrait pas détruire aussi vite les aquarelles qui ne lui plaisent plus… Sait-on jamais ses petits enfants ou ses arrières petits enfants découvriront peut-être un trésor au fond de leur grenier !

Enfin qui peut le plus peut le moins. Si tu gardes tu peux encore jeter, mais si tu jettes tu ne pourras plus garder… En conclusion garde tes dessins, tes aquarelles et tes pastels. Il sera toujours temps plus tard de changer d’avis… Je te félicite de m’avoir lu jusqu’au bout et je te dis “à très vite pour un nouveau sujet“.

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2 thoughts on “Faut-il jeter ses dessins ?

  1. J’ai décidé sans jouer au tarot de conserver mes dessins en tout cas jusqu’à ce que je sois assez vieille pour faire le tri avec mes enfants qui décideront s’ils veulent garder ou non mes dessins. Je trouve qu’il ne faut pas encombrer les vivants mais des dessins dans des cartons ça ne prends pas de places alors tant que je suis là je les gardes car c’est ma vie mon parcours mes progrès. Du coup j’arrive à la même conclusion que toi!!!

    1. Bonjour Elisabeth,

      Tu as parfaitement raison et je t’en félicite. Mon amie Maryse a conservé beaucoup de ses oeuvres et je m’en réjouis mais elle en a détruit aussi et c’est dommage. Il est vrai que lorsque les aquarelles sont encadrées elles prennent beaucoup de place mais il y a toujours une solution à tout problème.

      Garder ses dessins et ses travaux permet – comme tu le dis si bien – de mesurer ses progrès. Si tu jettes tu n’as plus d’éléments de comparaison car la mémoire nous joue constamment des tours et embellit nos souvenirs ou au contraire les dévalorise.

      Prend soin de toi et bravo pour tes progrès que je constate régulièrement sur Instagram.

      Bises amicales
      Jissé

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